Historique

DES MAGISTRATS AUX MŒURS DE LA CONVENTION…
AUX D.D.E.N. DE LA Ve RÉPUBLIQUE

 

Il semble bien que de tout temps, ou, du moins, depuis qu’existent des écoles, des notables ou des citoyens – toujours bénévoles – aient exercé une mission de parrainage et de surveillance des établissements scolaires. Déjà Platon dans « Les Lois » – ouvrage de pure théorie il est vrai – prévoyait « des magistrats chargés de veiller à l’aménagement des gymnases et des écoles, à la surveillance des locaux ainsi qu’à la fréquentation scolaire ».

Même s’ils ne remontent pas jusqu’à l’Antiquité, les historiens s’accordent généralement pour trouver l’ancêtre de notre fonction dans la personne du « magistrat aux mœurs » créé par la Convention en 1793. Plus tard, en 1806, le 1er Empire nomme dans le même rôle des Conseillers et réserve cette charge aux ecclésiastiques.

En 1816, sous la Restauration, apparaissent les « Comités de Charité » ou comités gratuits qui deviendront par la suite des « Comités de surveillance » (à divers échelons : commune, canton…) et leurs membres sont appelés notables. Leur mission de contrôle est exercée conjointement par des surveillants spéciaux (1816) ou des inspecteurs gratuits (1828).

C’est en 1833, sous le ministère de Guizot que le terme de délégué fait son apparition, ainsi que la nomination triennale qui durera jusqu’en 1981.

La « loi Falloux » du 15 mars 1850 supprime les comités et crée les « délégations cantonales » formées de délégués cantonaux. Ce sont alors des auxiliaires de l’Administration, de véritables inspecteurs surveillant les sentiments politiques et religieux des instituteurs et la moralité de leur action, ce qui leur vaudra l’appellation « d’agents d’intolérance ». En somme, on peut considérer que de 1806 jusqu’à l’avènement de la IIIe République, ce lointain ancêtre était avant tout l’œil des Pouvoirs civils et religieux.

Il en est tout autrement avec la loi Goblet du 30 octobre 1886, complétée par le décret du 18 janvier 1887. Certes la dénomination est maintenue, mais le délégué cantonal devient le regard des familles et de la société. C’est un « homme d’influence », un « sage que l’on consulte », une sorte de missionnaire laïque et républicain soucieux de son indépendance, et qui va contribuer à l’enracinement de l’école publique dans le pays. Il apparaît donc sous son jour actuel et il est notre véritable ancêtre.

Sous la IIIe République, de nombreux textes officiels – comme les circulaires ministérielles du 10 juillet 1895, du 10 janvier 1900, du 1er mars 1909, du 5 juillet 1920, du 16 mai 1922 et du 5 décembre 1924 pour citer les plus importantes – précisent le rôle du délégué dans les domaines suivants : surveillance des locaux scolaires, fréquentation scolaire, hygiène, salubrité et sécurité, œuvres péri et postscolaires.
Ils fixent également les critères pour le choix des délégués :

« Il faut chercher avec soin le concours de véritables amis de l’école, de ceux qui ne considèrent point leur nomination comme un titre purement honorifique » (Georges Leygues – 1900 – critère rappelé par la C.M. du 19/03/1970).

Il faut que « l’attachement des délégués cantonaux à la cause de l’enseignement public soit incontesté » et que « leurs actes témoignent d’un dévouement sincère à l’Université » (Georges Leygues – 1900, et François Albert – 1924).

« Il importe de faire une large place dans les délégations cantonales aux femmes dont la collaboration est indispensable, chaque fois qu’il s’agit d’assurer le bien-être physique et moral de l’enfant » (Gaston Doumergue – 1909).

Le 13 décembre 1940, le « régime Pétain » supprime les délégations cantonales et la circulaire ministérielle du 24 février 1945 les rétablit. Le 14 février 1948 est créé le titre de « délégué cantonal honoraire ».

C’est en 1969 que le délégué cantonal devient le « délégué départemental de l’Education Nationale » (circulaire ministérielle du 20 juin 1969) et le ministre Edgar Faure justifie ainsi ce changement : « Il faut substituer au titre de délégué cantonal une désignation plus explicite, à la fois plus proche de son objet, d’un trait plus actuel et qui permettra en même temps dans l’avenir un certain élargissement éventuel de la mission du délégué au-delà des nouvelles limites de l’enseignement du premier degré ».

Par ailleurs, « la notion de canton doit être abandonnée » et les « délégations seront alignées sur les secteurs scolaires ». Un représentant de la délégation départementale siège à titre consultatif au Conseil départemental de l’Enseignement primaire.

Les textes officiels du 27 mai 1969, du 28 décembre 1976, du 26 janvier 1978, et le décret 80-906 du 19 novembre 1980 évoquent la participation du D.D.E.N. au Conseil d’école. Le plus important est le dernier qui fait du délégué un membre de droit du Conseil d’école.

Le décret n° 80-905 du 19/11/1980 stipule que les D.D.E.N. seront désormais désignés pour 4 ans et renouvelés par moitié tous les deux ans (cette dernière disposition sera annulée en 1983).

À noter encore l’arrêté du 13/05/1985 et la circulaire ministérielle du 10/09/1985 concernant la composition et le fonctionnement du Conseil d’école et la constitution d’une commission – dont fait partie le D.D.E.N. – chargée de l’organisation des élections des représentants des parents d’élèves.

Enfin, le 10 janvier 1986 est paru le décret actualisant notre statut, décret auquel nous nous référons aujourd’hui. Il est à remarquer que ce texte étend notre fonction à toutes les questions relatives à l’environnement scolaire.

Cette actualisation du statut de délégué, comme d’ailleurs sa participation au Conseil d’école et la publication d’autres textes, n’a pu être obtenue qu’après de longues démarches de la Fédération des D.D.E.N.